Cinq générations d’épiciers présents à Rawdon depuis cent ans
Cet article rappelle les cent ans d’existence d’une famille d’épiciers au service de la population de Rawdon depuis l’ancêtre, Arcade Marchand jusqu’à la famille Guilbault en passant par les Gareau. Il permet de constater l’évolution des épiceries à Rawdon, ces commerces essentiels à notre saine alimentation.
Arcade Marchand
Né à Saint-Alphonse le 26 février 1896, Arcade Marchand avait 26 ans lorsqu’il déménagea à Rawdon en 1922. Sa femme Régina Forget (née en 1901 et décédée en 1938) qu’il avait épousé le 14 juillet 1920 et leurs enfants (ils en avaient deux à cette époque et en eurent éventuellement sept) l’accompagnèrent. Issu d’une famille de commerçants, la pratique usuelle à cette époque consistait à construire son commerce en l’annexant à la résidence comme le démontre la photographie ci-contre.
Arcade construisit donc résidence et commerce sur la rue Metcalfe en face de la deuxième avenue. L’emplacement correspond aujourd’hui à un terrain vacant à l’adresse civique du 3487 rue Metcalfe. Il se retrouve à l’emplacement # 11 de la carte dessinée par Helen Copping (voir carte ci-contre).
Au fil des ans, des dépendances telles entrepôts et écuries pour les chevaux s’ajoutèrent à l’arrière du bâtiment principal, les chevaux servant à effectuer les livraisons de commande.
De type « magasin général », ce commerce fournissait des produits d’alimentation tels fruits, légumes, mélasse et céréales, mais aussi des produits de nettoyage et du kérosène pour alimenter les lampes à l’huile encore utilisées entre 1920 et 1940. Il faut se rappeler qu’à cette époque, la gamme de produits offerte dans les épiceries est relativement limitée. Ces produits étaient souvent vendus en vrac. Les produits de base tels le lait, le pain, le beurre ou les viandes étaient achetés directement du producteur. À Rawdon comme dans de nombreux villages du Québec, il y avait un laitier, un boulanger, une beurrerie et un boucher. Dès leurs jeunes âges, les enfants d’Arcade et de Régina aideront les parents et s’initieront aux pratiques commerciales. Richard Corcoran, « homme à tout faire et livreur » s’ajoutera aux enfants et demeurera à l’emploi d’Arcade et Régina pendant de nombreuses années. Peu de temps après avoir été élu commissaire d’école en juillet 1942, Arcade Marchand décède subitement à l’âge de 46 ans, le 4 février 1943. Grâce à leur travail et ténacité, Arcade Marchand et son épouse auront réussi à faire prospérer leur entreprise en dépit de la récession du début des années 30 et de la guerre de 1939-1945. L’expérience acquise par les enfants s’avéra fort à propos car, à son décès, leur fille ainée, Nicole Marchand prit la relève à l’âge de 19 ans et ce, tout en acceptant la responsabilité de ses jeunes frères et soeurs.
Marché J.P. Gareau
Nicole épousa Jean Paul Gareau le 17 juin 1944 et le commerce prit alors le nom de Marché J.P. Gareau.
Si les chaines de magasins d’alimentation telles que nous les connaissons aujourd’hui ont commencé à se développer au début du vingtième siècle en Amérique du Nord, au Québec, il faudra attendre le milieu du siècle avant que de telles chaines ne s’implantent. Un pionnier dans le domaine, Steinberg ouvrira son premier magasin en 1917 mais son expansion ne se fera qu’après la seconde guerre. Pour disposer d’un même pouvoir d’achat que ces chaines, des regroupements d’épiciers indépendants commencent à voir le jour. La gamme de produits offerts s’élargit. Avec l’amélioration du transport, les produits offerts dépendent de moins en moins de producteurs locaux. Marché J.P. Gareau se joindra d’abord à la bannière régionale « Marché Idéal » mis sur pied par Provisions St-Félix ltée en 1960 pour ensuite joindre Métro en 1964. En rejoignant ces regroupements, les épiciers indépendants peuvent s’approvisionner à des coûts comparables à ceux des grandes chaînes qui dominent le marché canadien (Dominion, Loblaw, A&P et Steinberg). À Rawdon, les compétiteurs à l’époque incluaient une épicerie arborant la bannière Richelieu située au coin de la rue Metcalfe et de la troisième avenue et une arborant la bannière Provigo, propriété de M. St-Amour, située sur la rue Queen entre la septième et la huitième avenue.
Avec la croissance de la population et l’augmentation du tourisme, le nombre d’employés s’accroit passant de quelques personnes jusqu’à une quinzaine de personnes. Pierrette Marin, Murt Tinkler, Jean-Guy Lebeau et Doris Marchand comptent parmi ce personnel des plus dévoués.
Alimentation Gareau Inc.
En 1970, après plus de 25 ans consacrés à l’entreprise, Nicole Marchand et Jean-Paul Gareau prirent une retraite bien méritée et cédèrent l’entreprise à leur fille ainée, Jocelyne et à son mari, Denis Guilbault. Avec une population toujours en croissance et une économie florissante, Denis et Jocelyne se virent forcés d’agrandir les locaux vers la fin des années 70 et doublèrent la superficie du commerce la portant à 3800 pieds carrés. Une vingtaine de personnes y travaillent.
Au milieu des années 80 et avec une clientèle de plus en plus importante, Jocelyne et Denis décidèrent de construire un tout nouveau magasin d’une superficie de 12 500 pieds carrés à l’angle nord-est de la première avenue et de la rue Queen et de rejoindre la bannière IGA. Sage décision que cette nouvelle construction car, en mai 1987, le feu ravage le commerce situé sur la rue Metcalfe. Dès le mois de juillet 1987, grâce au travail acharné de nombreux collaborateurs, leur entreprise emménagea dans ses nouveaux locaux.
IGA Famille Guilbault
Le nouvel emplacement situé au 3450 rue Queen a permis d’offrir un plus grand nombre de produits à sa clientèle tout en y ajoutant les services de boulangerie et de charcuterie. Beaucoup plus grand, le magasin de la rue Queen emploie plus de quarante personnes. Denis Généreux, au département des viandes, Jean-Guy Lebeau au fruits et légumes et James (Jimmy) Tinkler à l’épicerie générale comptent parmi ces nombreuses personnes qui y ont travaillé et qui ont marqué l’histoire de ce magasin.
Les fils de Denis et Jocelyne, Sylvain et Martin se joignent à l’entreprise en 1990 et la prendront en charge en 2010. Les enfants de Sylvain (Audrey et Virginie) et de Martin (William, Alexandrine, Timothé et Elliot) auront tôt fait de joindre l’entreprise ce qui amène une cinquième génération. L’entreprise fêtera, en juillet 2023, ses cent ans d’existence. Durant ces années, cinq générations d’une seule et même famille auront eu le plaisir de servir les résidents de Rawdon et visiteurs.
Informations obtenues de Jocelyne Gareau Guilbault en mai et juin 2023